HPI : comprendre scientifiquement pour accompagner intelligemment
- francoisregisribes
- 18 sept.
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 22 sept.

Au cours de mon interview avec Nicolas Gauvrit, chercheur spécialiste du haut potentiel intellectuel, il me confirme que HPI n’est pas le sigle pour Hypersensible Perdant Incompris. HPI signifie simplement que notre QI dépasse 130, sans autres spécificités que celle-ci au premier plan. Moins glamour qu’il n’y paraît, cette définition nous renseigne toutefois sur deux choses importantes :
1. Le HPI est une potentialité cognitive avant d’être un handicap émotionnel et social. Certes imparfait, le test de QI nous renseigne de façon assez fiable sur les capacités cognitives d’un individu, lesquelles prédisent assez bien sa réussite académique et professionnelle. Ainsi, un haut potentiel intellectuel rime davantage avec insertion sociale et stabilité émotionnelle qu’avec isolement et hypersensibilité.
2. Le HPI est une différence quantitative et non qualitative. Autrement dit, passer le seuil de 130 au QI ne me distingue pas radicalement d’un individu avec un QI de 120, je suis un peu plus performant mais ce seuil de 130 ne me fait pas développer une mémoire photographique, ni la faculté de penser plusieurs choses en parallèle.
Cela signifie-t-il pour autant qu'une personne avec un haut potentiel intellectuel ne doit pas être accompagnée ? Bien au contraire. L’accompagnement doit cependant tenir compte des 3 dimensions suivantes : Réalisation du potentiel - Équilibre identitaire et social - Rapport sain à l’émotion.
Réalisation du potentiel
Une fois identifié, l’enjeu est d’optimiser les facteurs qui permettent l’expression du potentiel intellectuel révélé par les tests. Il s’agit d’identifier vos réalisations (réussite scolaire, projet ambitieux, accomplissement artistique ou entrepreneurial) et de détecter les facteurs ayant favorisé ou freiné leur émergence :
Environnement stimulant : entourage accompagnant mais non pressurisant, tuteurs, mentors, formation accessible… autant de facteurs qui favorisent l’accomplissement du potentiel.
Persévérance et investissement : la capacité à investir du temps, de l'énergie et de la résilience face aux épreuves sur le long terme est un facteur systématiquement cité.
Croyances et self-monitoring : la capacité à s’auto-analyser pour identifier les blocages potentiels est également essentielle.
Équilibre identitaire et social
La confirmation d’un HPI peut amener à revoir toute sa biographie à l’aune de cette seule caractéristique : “J’étais seul au collège, c’est parce que j’étais trop intelligent pour les autres”. Il est bon de rappeler qu’un haut potentiel intellectuel est une différence quantitative qui ne nous distingue donc pas radicalement pas du reste des individus. Faut-il également rappeler que nous sommes plus que nos performances cognitives, et que d’autre dimensions telles que nos valeurs, nos envies, notre personnalité, nos besoins et nos rencontres déterminent autant voire plus notre vie. Un sentiment d’isolement peut être contextuel et transitoire. Un échec ne remet pas en question toute votre valeur. Faire une place équilibrée à son HPI permet de l’exprimer au mieux et de s’épanouir.
Rapport sain à l’émotion
Enfin, une compréhension fine du rapport spécifique que le HPI entretient avec l’émotion peut être un vecteur d’épanouissement.
L’inflation cognitive de l’émotion :
D’un événement banal, le HPI peut faire une analyse excessive et y consacrer une importance démesurée. À cette suranalyse s’ajoute la surexpression de biais cognitifs. Le HPI n’est pas exempt de biais cognitif, et peut même y être davantage soumis : biais de disponibilité (survalorisation des infos facilement accessibles, or sa capacité de mémoire augmente ce biais) ou biais de confirmation (utilise sa capacité argumentative en faveur de sa croyance initiale).
L’excès de rationalité :
Sans être infirme sur le plan émotionnel, le HPI se rend vite compte qu’il maîtrise davantage le monde de la rationalité que le monde de l’émotion. Il est donc très tôt enclin à déplacer les problèmes émotionnels sur le terrain rationnel qu’il maîtrise. Il n’est pas rare de constater chez lui un pragmatisme à toute épreuve à l'âge adulte : “Cette proposition d’emploi m’a été refusée. C’est sûrement car mon CV n’est pas aligné, je dois modifier ma stratégie.” Or cette gestion irréprochable d’un problème sur le plan rationnel, peut occulter une émotion sous-jacente. “Ce refus m’attriste car je le vis comme une remise en question de mes compétences”, l'émotion fournit de précieuses informations sur nos besoins psychologiques fondamentaux. En l'occurrence, elle peut être le signal d’un sentiment de manque de reconnaissance qu’il faut identifier et faire valoir pour traiter le problème en profondeur plutôt qu'en surface.
Hyperstimulabilité (et non l’hypersensibilité) :
Le traitement efficace des informations qui l’entoure et l’analyse approfondie que permettent ces capacités cognitives, rendent le HPI hyperstimulable. Autrement dit, le HPI est réceptif à d’autant plus de choses avec d’autant plus de profondeur. Il accède relativement tôt dans l’enfance à diverses notions telles que l'injustice, la mort ou la logique le soumettant à d’autant plus de crises sociales, métaphysiques ou épistémiques. Or ces crises sont vectrices de croissances personnelles comme le suggère la théorie de la désintégration positive voulant que les crises que vit un individu sont la condition d’accès à la maturation et la croissance intérieure. Aussi, l'intensité émotionnelle que peut vivre une personne HPI est à comprendre dans le cadre d’un processus constructif et non comme une hypersensibilité suggérant l’adoption d’une posture fataliste et passive face aux émotions.
Conclusion
Une bonne compréhension de ce qu’est vraiment le HPI révèlent les dimensions d’accompagnement de réalisation du potentiel, d'équilibre identitaire et social et de rapport sain à l’émotion susceptibles de réellement faire la différence dans l’accès à l’épanouissement. Si vous souhaitez un contenu plus immersif accompagné d’exemples concrets issus de ma pratique, cet article est accompagné d’un podcast accessible ici : https://francoisregisribes.wixsite.com/fran/podcast/episode/f4d4c06a/hpi-recherche-and-clinique







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